# Mythes et réalités de la pédagogie Freinet
# Introduction
Enseignant en pédagogie Freinet pendant des années, dans une des quelques écoles Freinet en France, à Marseille, j'ai longtemps essayé d'expliciter, de justifier le bien fondé de mes pratiques et de celles de centaines d'autres enseignants auprès de personnes curieuses de comprendre pourquoi, alors que tout semblait si bien marcher, nous étions si peu à appliquer la pédagogie Freinet. J'ai remarqué que la pédagogie Freinet, remise au goût du jour pour le grand public et dans les média avec le grand "boum" des pédagogies alternatives qui avait pour fer de lance Céline Alvarez et son adaptation libérale de la méthode Montessori, était méconnue, même par certains de ses praticiens. Devenu désormais formateur d'enseignants, j'ai décidé d'écrire ce petit livre pour clarifier certains points autour **des pédagogies Freinet** (pour reprendre le titre d'un livre de Sylvain Connac). https://www.persee.fr/doc/spira_0994-3722_2010_num_45_1_1157
Pourquoi ce choix du pluriel ? Comme nous le verrons dans un des mythes que nous aborderons plus loin, la pédagogie Freinet, contrairement à la méthode de la doctoresse italienne, est basée sur des techniques, des principes, des **invariants** qui font qu'elle peut s'adapter aux époques, au public et aux média qu'elle utilisera. On parlera également de pédagogie Freinet, ou de techniques Freinet, plutôt que de méthode, mot qui sous-entend que la façon de faire est figée et assez peu adaptable, comme dans la méthode Montessori.
Selon les propres mots de Freinet :
>"Mme Montessori se flatte, d’une façon parfois bien immodeste, d’avoir établi scientifiquement son matériel, d’avoir découvert cet « appareil scientifique » nécessaire et suffisant à une bonne éducation. Nous pensons qu’elle exagère. Son matériel est un énorme progrès, surtout celui qu’elle destine aux écoles maternelles. On aurait tort cependant de le considérer comme définitif. Car il n’y rien de plus dangereux qu’une méthode qui se fixe, qui se fige dans sa forme, et qu’un auteur qui tient pour intangible son système « breveté »."
> **Notes sur l’adaptation de notre enseignement, L’École émancipée, n°29 19 avril 1925**
Selon que l'on est dans une classe à effectif pléthorique de Dagana au Sénégal ou dans un CM2 urbain à Marseille, l'esprit reste le même, mais la façon d'appliquer les invariants de la pédagogie Freinet sera forcément différente. Le **texte libre** peut donc très bien s'écrire sur un ordinateur, une tablette, une ardoise avec des feutres effaçables et pas sur la traditionnelle imprimerie à caractères mobiles miniature chère à ceux qui l'avaient commandée auprès de la Coopérative de l'Enseignement Public (CEL), organisme qui avait permis de fabriquer, transmettre et faire rayonner les outils et publications des techniques de **l'Ecole Moderne**. Le but ultime étant bien l'expression libre de l'élève et son éventuelle médiatisation, par journal, lettre, blog, "post" sur un réseau social, le média par lequel il va s'exprimer est finalement secondaire.
Si j'ose pousser plus loin la réflexion, il est possible d'analyser que le rejet des média modernes par certains parents souhaitant mettre leurs enfants dans une école alternative, en prenant l'exemple (mythique) des patrons de la Silicon Valley qui préserveraient leurs enfants des effets nocifs des "écrans" est même antonomique des préoccupations d'un enseignant Freinet souhaitant faire "rentrer la vie dans la classe". Un excellent livre coordonné par Severine Erhel et Anne Cordier aborde d'ailleurs ces mythes et paniques morales autour des "écrans", expression qui ne veut finalement pas dire grand chose, les usages que l'on peut faire avec eux étant quasi infinis, la preuve, on peut même les utiliser en pédagogie Freinet !
Je vous propose donc d'aborder dix mythes, ceux que j'ai souvent entendus, en stage, en classe, ou lors de discussions parfois musclées lors de mes inspections. J'espère que votre connaissance de la, ou plutôt des pédagogies Freinet sera plus large à la fin de ce livre, pour, je l'espère, permettre à celles et ceux qui voudront oeuvrer à l'émancipation des élèves dans les classes et ailleurs de la mettre en place plus efficacement.
Comme le disait Freinet pendant les congrès de l'ICEM, en lançant les ateliers : "Au travail, camarades !"
# Chapitre 1 : "La pédagogie Freinet, c'est l'école du laisser-faire"
## 1. Présentation de l'idée reçue
Lorsqu’on évoque la pédagogie Freinet, une critique récurrente consiste à l’associer à une forme d’enseignement permissif, où les élèves feraient ce qu’ils veulent, sans cadre ni exigence. Certains parents d'ailleurs, adoptant une posture inquiétante de consommateurs plus que de d'usagers de l'école cherchent des enseignants se revendiquant de l'idée qu'ils se font de la pédagogie Freinet en espérant trouver une classe sans exigence, ou leur progéniture pourra colorier ou buoquiner tranquillement toute la journée s'il l'a choisi et en évitant qu'il subisse toute forme de contrainte qu'ils jugeront comme "violente".
Cette vision, bien évidemment fausse, repose sur une confusion entre la pédagogie Freinet et d’autres approches éducatives dites "libres", comme celles mises en œuvre à Summerhill ou dans les écoles Sudbury.
### L'école de Summerhill et la pédagogie Sudbury : des modèles d'autogestion scolaire
Fondée en 1921 par A.S. Neill, l’école de Summerhill, en Grande-Bretagne, repose sur un principe fondamental : la liberté totale de l’enfant. Les élèves y sont libres de choisir leurs activités et ne sont pas obligés d’assister aux cours. L’accent est mis sur le développement personnel et le bien-être plutôt que sur l’apprentissage académique traditionnel. Cette approche repose sur l’idée, fondamentale chez Neill, que les enfants apprendront d’eux-mêmes lorsqu’ils seront prêts et motivés, sans contrainte extérieure. Neill croit à la bonté de l'enfant, qui, s'il est dans un milieu tolérant et rempli d'amour, apprendra à son rythme, quand il le choisit. Il rendra compte de son experience dans son libre à succès, sorti aux US dans les années 1960 "Libres enfants de Summerhill".
De leur côté, les écoles Sudbury, nées aux États-Unis dans les années 1960, poussent encore plus loin cette logique. Dans ces écoles, il n’y a ni programme imposé, ni enseignants au sens traditionnel. Les enfants sont libres de gérer leur temps comme ils l’entendent et de participer, ou non, à des activités d’apprentissage formelles. Les décisions concernant l’école sont prises démocratiquement par les élèves et les adultes, chaque vote ayant la même valeur.
Ces modèles éducatifs reposent sur une confiance absolue dans l’auto-détermination des enfants et rejettent toute forme d’imposition d’un savoir structuré par l’adulte. Ces écoles ont des adeptes en France, elles sont souvent regroupées sous le terme "écoles démocratiques". Dans ces écoles, qui ont un statut souvent associatif hors contrat, des adultes cumulent parfois le rôle d'administrateur de l'association, mais aussi parent et bénévole pour l'entretien de locaux. Ils choisissent de scolariser leur enfant dans un cadre alternatif à l'école publique pour des raisons valides et honorables, comme le respect du rythme de l'enfant ou le fait de mettre plus l'accent sur des apprentissages artistiques.
Il est donc compréhensible que la pédagogie Freinet soit parfois perçue comme proche de ces méthodes pour des parents souhaitant une approche différente de l'école. Pourtant, la réalité est bien différente.
Les militants Freinet ont choisi l'école publique et quand ils travaillent dans une école en France, sont donc fonctionnaires d'état, au même titre que n'importe quel enseignant dans une école publique. Ils ne considèrent pas la pédagogie Freinet comme une pédagogie alternative, mais comme une autre façon de fonctioner, au sein de l'Education nationale.
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## 2. Qu'en est-il en réalité ?
Contrairement aux écoles de Summerhill et Sudbury, la pédagogie Freinet ne prône pas l’absence de cadre ni l’apprentissage laissé au seul gré de l’enfant. La notion de liberté est polysémique est peut donner lieu à des interprétations différentes. En réalité, et c'est bien inscrit dans les droits de l'Homme et du Citoyen, notre liberté s'arrête là où commence celle de l'autre. Dans une classe en pédagogie Freinet, on ne fait pas ce qu'on veut. L'organisation repose au contraire sur une répartition des tâches collectives et individuelles rigoureuse du travail scolaire, où l’autonomie des élèves est encouragée, mais dans un cadre structurant assuré par l'adulte.
### Les invariants pédagogiques de Freinet
Célestin Freinet a formulé 30 "invariants pédagogiques" vers la fin de sa vie, qui structurent la vision de l’éducation du collectif qu'il a contribué à créer avec Elise, son épouse et les pionniers des mouvements de l'Ecole moderne, dont les membres de l'Institut Coopératif de l'Ecole Moderne (l'association ICEM- Pédagogie Freinet, qui existe encore de nos jours). Certains de ces invariants permettent de comprendre en quoi sa pédagogie est loin du "laisser-faire" :
- **Invariant n°1 : "L’enfant est de la même nature que l’adulte."** → Les enfants ne sont pas naturellement enclins à la paresse, mais ont besoin d’un environnement stimulant et structuré pour apprendre et travailler. Cet invariant est souvent cité et détourné pour prétendre qu'en pédagogie Freinet, l'enfant doit être traité comme un adulte, ou avoir des droits identiques aux adultes. Bien que le mouvement Freinet porte les valeurs de la convention internationale des droits de l'enfant, on parle bien de même "nature" que l'adulte : comment pourrait-on refuser à un enfant de boire du whisky s'il le choisissait si l'on prétendait qu'il a les mêmes droits qu'un adulte ? L'adulte est donc garant du respect porté à chaque enfant, le fait qu'il a le droit, à son niveau, de s'autodéterminer, par exemple pour le choix de son travail, son organisation, ou le sujet d'étude qui l'interesse.
- **Invariant n°7 : "Chacun aime choisir son travail, même si ce choix n'est pas avantageux."** → Loin de signifier une absence de guidage, cet invariant souligne la nécessité de rendre l’apprentissage signifiant pour l’élève. En réalité, la pédagogie Freinet est la pédagogie du travail choisi, et pas de l'oisivité. Quand on a choisi un travail, on doit ensuite en référer au groupe classe, car on devient responsable de cette partie du travail collectif.
- **Invariant n°16 : "L’enfant n’aime pas écouter une leçon ex cathedra."** → Cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de leçons, même magistrale, mais que l’apprentissage doit être actif et relié à la vie, à une situation concrète du vécu de la classe. Surtout, il est possible de faire un apport de savoir, par l'enseignant ou un pair, quand le travail le necessite. On peut donc imaginer que l'enseignant va enseigner les fractions à ses élèves de CM, car une recherche mathématique menée par certains d'entre eux demande qu'ils développent cette compétence scolaire pour répondre à la problématisation posée.
- **Invariant n°21 : L'enfant n'aime pas le travail de troupeau auquel l'individu doit se plier comme un robot. Il aime le travail individuel ou le travail d'équipe au sein d'une communauté coopérative."** → Contrairement à l’idée d’une éducation laxiste, cet invariant affirme que l’enfant prend plaisir à l’effort lorsqu’il a du sens.
### Une structuration rigoureuse du travail
Dans une classe Freinet, le travail des élèves est organisé autour de plans de travail individuels ou collectifs, qui permettent d’assurer une progression structurée et adaptée au rythme de chacun. Les temps de travail, individuels ou collectifs sont planifiés, voire négociés au sein d'une réunion coopérative, et les élèves sont responsables de la mise en place de leurs temps de travail sous le regard attentif de l’enseignant qui régule, maintient le cadre, relance et peut être sollicité dans ces moments de classe.
Quand un élève sollicite l'enseignant, ce temps en relation duelle est d'autant plus efficace car l'élève a atteint un point de son travail, sa recherche, ses tâtonnements, où l'intervention de l'adulte est d'autant plus pertinente qu'elle sera immédiate et ciblée sur une difficulté que l'élève aura lui même repérée, comme le souligne une note récente du CSEN. https://www.reseau-canope.fr/fileadmin/user_upload/Projets/conseil_scientifique_education_nationale/syntheses_et_recommandations/19_approche_reponses_intervention/CSEN_Synthese_19_intervention_WEB_002.pdf
Ces interactions qui peuvent durer simplement quelques secondes et se renouveler de nombreuses fois durant le cours du temps de travail, permettent à l'enseignant d'établir une connaissance fine du niveau de chaque élève, une individualisation des parcours de chacun, que ne permettent pas d'autres façons de faire classe.
Les techniques Freinet, comme le texte libre, l’imprimerie en classe ou les fichiers autocorrectifs, sont des outils au service d’un apprentissage rigoureux. Loin d’être livrés à eux-mêmes, les élèves sont guidés dans un cadre précis où l’entraide, la coopération et l’auto-évaluation sont essentielles.
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## 3. Concrètement, des outils pour la classe
### Le conseil de classe : un cadre collectif structurant
Dans une classe Freinet, le **conseil de classe**, qui peut aussi prendre d'autres noms comme **réunion de coopérative**, est un moment clé où élèves et enseignant organisent la vie de la classe. C’est un espace où les règles sont discutées, les responsabilités réparties et les projets planifiés. Ce cadre collectif permet d’éviter toute dérive vers une absence de régulation où les élèves ne sauraient pas explicitement ce qui est attendu d'eux, ou bien n'auraient rien à faire sur un temps scolaire.
### Le plan de travail : un outil d’autonomie guidée
Plutôt que de suivre un emploi du temps rigide imposé par l’enseignant, les élèves avancent grâce à un **plan de travail** qui définit les tâches à réaliser sur une période donnée. Ce plan est élaboré avec l’enseignant et inclut des exercices issus des **fichiers auto-correctifs**, des recherches et des productions à mener. Cela favorise la responsabilisation et évite de laisser l’élève sans repères. Bien plus qu'un simple outil de régulation du travail, il peut prendre plusieurs formes, individuelles ou collectives (par exemple en maternelle). Il est de toutes façons mis en place pour servir l'élève dans l'organisation de ses temps de travail individualisé, il n'est **pas un outil de contrôle** de l'enseignant, qui donnerait, par exemple, les mêmes exercices à tout le monde, à faire dans l'ordre choisi. Même si cette modalité de travail peut être mise en place pour se lancer en pédagogie Freinet, le but est d'aller vers la proposition d'un parcours individualisé de chaque élève où ils seront associés à l'organisation coopérative du travail.


### Les fichiers auto-correctifs : une autonomie cadrée
Pour éviter le piège du "chacun fait ce qu’il veut" ou de rester simplement dans une organisation où "chacun choisit l'ordre de ses exercices", qui, bien qu'étant un premier pas vers une autononisation du travail, n'est pas suffisante pour vraiment profiter de toute la cohérence et les apports que permet la pédagogie Freinet, l'organisation de la classe repose sur des outils d’auto-apprentissage comme les fichiers auto-correctifs. Ces supports permettent aux élèves de progresser à leur rythme en s’évaluant eux-mêmes, avec l’aide de leurs pairs et de l’enseignant. Une fois des exercices d'entrainements proposés aux élèves, ils peuvent choisir de valider leurs compétences par des brevets, inspirés de la méthode scoute de Baden Powell, qui valident leur niveau à un instant T sur une compétence ciblée, qui a été choisie explicitvement par l'élève et consignée dans le plan de travail au début de la période choisie par l'enseignant. Les fichiers autocorrectifs proposés par l'ICEM, aux éditions PEMF, comportent des fiches "tests" sans correction, qui peuvent être utilisées à cette fin d'évaluation.
### Les brevets : un outil d'explicitation des attendus de l'école.


Les brevets, qui peuvent prendre la forme d'un cahier de réussites, de ceintures, permettent à l'élève de consulter et voir explicitement ce qui est attendu de lui, dès le moment où il rentre dans son apprentissage. La liste des brevets est disponible, peut être enrichie selon les tâtonnements de la classe, les présentations lors des temps d'oral, les sorties... On peut par exemple rajouter un brevet autour d'un rubik's cube ou de la connaissance d'une danse qui a été proposée par un élève. Cette explicitation permet à chaque élève de voir leur propre progrès à travers un document qu'il renseigne régulièrement avec l'aide de l'enseignant.

### Un enseignant facilitateur et structurant
Loin d’être un simple observateur passif, l’enseignant en pédagogie Freinet joue un rôle de **facilitateur et d’accompagnateur**. Il observe, guide, relance et ajuste les temps de travail en fonction des besoins des élèves et de ce qu'ils ont écrit dans leur plan de travail. Il est garant du cadre de travail et veille à ce que chaque élève progresse selon ses capacités de travail, en tenant compte de sa zone proximale de développement et de son niveau scolaire.
Les possibilités de différenciation sont donc profondément ancrées dans les techniques Freinet. Il n'est donc pas rare de voir des classes multiâges chez des enseignants en pédagogie Freinet. En effet, une classe de CE1 en début d'année contient autant de niveaux qu'il y a d'élèves, en lecture notamment, et exigera autant de travail de suivi et d'adaptation d'une classe avec des CP, des CE1 et des CE2.
### Références et ressources
- **ICEM - Institut Coopératif de l'École Moderne** : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)
- **Freinet, C. (1964). "Les invariants pédagogiques".**
- **Meirieu, P. (1998). "Apprendre... oui, mais comment ?"**.
- **Favre, D. (2024). "Cessons de démotiver les élèves"**.
- **Freinet C., Petitcolas J. (1965). "Dossiers pédagogiques de l’Ecole Moderne, Brevets et Chefs-d’œuvre"**.
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### Conclusion
Assimiler la pédagogie Freinet à une absence de cadre est une méprise. Si l’autonomie des élèves est bien un pilier fondamental, elle se développe cependant dans une organisation précise où l’enseignant joue un rôle actif, où la dévolution de la tâche telle que la définit Guy Brousseau se base sur des situations authentiques, car partagées entre l'enseignant et l'élève, et ancrée sur le vécu de la classe.
Grâce à des outils comme le conseil de classe, le plan de travail et l’auto-évaluation, cette pédagogie permet d’éviter les écueils du "laisser-faire" tout en rendant les apprentissages plus significatifs et motivants pour chacun des élèves.
# Chapitre 2 : "Il n'y a pas de programme ni d’évaluations en pédagogie Freinet"
## 1. Présentation de l'idée reçue
Une critique fréquente adressée à la pédagogie Freinet est qu’elle fonctionnerait en dehors de tout cadre institutionnel, sans programme ni évaluation. Certains imaginent une classe où les élèves choisissent totalement leurs apprentissages sans progression structurée, et où l’absence de notes et de contrôles empêcherait tout suivi des acquis. Cette perception repose sur une méconnaissance du fonctionnement réel des classes Freinet et une confusion avec d’autres approches éducatives plus radicales.
### L’école sans programme : une idée issue de certaines pédagogies alternatives
Certaines écoles dites "libres", comme les écoles Sudbury ou l’école de Summerhill évoquées précédemment, adoptent une posture où l’enfant est totalement libre dans ses apprentissages, sans programme structuré. Dans ces contextes, il n’existe pas de progression imposée par un curriculum, et l’évaluation formelle des connaissances est généralement absente. L’idée sous-jacente est que l’enfant apprendra ce dont il a besoin lorsqu’il en ressentira l’envie ou la nécessité.
En France, l’Éducation nationale impose des programmes officiels, et toute école publique doit s’y conformer. Il est important de préciser qu'en France, les enseignants Freinet ont choisi de travailler dans des écoles publiques. Les écoles Freinet sont donc toujours dans le système scolaire public, "l'école du peuple", pour pouvoir travailler avec tous les élèves, sans distinction.
Tout en ayant choisi d'exercer au sein de l'Education nationale, les enseignants militant au sein du mouvement Freinet peuvent cependant continuer à critiquer l'institution, car ils continuent à la défendre, comme depuis des décennies, "Non pas pour ce qu'elle est, mais ce qu'elle pourrait être" comme le dit Véronique Decker. L'une des critiques émise par ces militants se situe au niveau des évaluations nationales standardisées, imposées chaque annés, dans chaque niveau, participant à une inflation de l'évaluationnite, que dénonçait déja Freinet par la formule paysanne "Ce n'est pas en pesant le cochon tous les jours qu'on le fait grossir". Cette multiplication des évaluations standardisées, dont les dérives ont été théorisées par le chercheur Frédéric Grimaud, contribue à la perte de sens que peuvent ressentir certains enseignants, d'où le refus de certains militants de s'y soumettre et d'imposer à leurs élèves à ce rituel, arguant de leur expertise et de leur confiance dans les techniques Freinet pour faire évoluer chaque élève à son niveau de compétences.
Pourtant, la persistance de l’idée selon laquelle la pédagogie Freinet n’aurait ni programme ni évaluation vient en partie de la spécificité de ses outils d’apprentissage et de leur méconnaissance, voire leur simplification ou détournement que l'on peut constater chez certains sites qui ne les remettent pas dans un écosystème cohérent de techniques émancipatrices. Ces outils, qui rompent avec l’évaluation traditionnelle et la rigidité des progressions classiques, peuvent donner l'illusion d'une désorganisation. Mais comme dans une ruche ou une fourmilière, une logique est présente et des instances de régulation existent.
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## 2. Qu’en est-il en réalité ?
La pédagogie Freinet et ses praticiens respectent les programmes de l’Éducation nationale, comme tout enseignant fonctionnaire, tout en aménageant des modalités d’évaluation et d'apprentissage adaptées aux rythmes et aux besoins des élèves.
### Une approche du programme différente mais structurée
La pédagogie Freinet ne rejette pas l’existence d’un programme, mais propose une manière plus souple et individualisée de l’aborder. Les apprentissages ne se font pas à travers des cours magistraux et des exercices standardisés, mais via :
- **Le tâtonnement expérimental**, élément fondateur de la méthode naturelle, centrale en pédagogie Freinet, où les élèves découvrent et construisent leurs savoirs à partir d’expériences concrètes, en rapport avec ce qu'ils vivent au quotidien. La méthode scientifique, basée sur l'émission d'hypothèses, la mise en place d'expériences, puis de validation de ce qui avait été formulé est une façon de vivre le tâtonnement expérimental en science. Les techniques Freinet applique cette approche dans tous les domaines, lecture, mathématiques, histoire etc.
- **Les projets et le travail coopératif**, qui permettent d’acquérir les compétences exigées par les programmes de manière plus engageante et motivante, en créant une émulation au sein de la classe, source de motivation et d'entraide.
- **Les fichiers auto-correctifs**, qui assurent une progression individualisée sans pression extérieure. Plusieurs niveaux peuvent donc être proposés dans une même classe, pour qu'aucun élève ne travaille en robot sur une tâche trop simple ou trop difficile.
- **Les plans de travail personnalisés**, qui organisent les apprentissages en fonction des objectifs de chaque élève.
Loin d’être désorganisée, cette manière de faire classe repose sur une structuration rigoureuse qui garantit une couverture complète des programmes officiels.
### Une évaluation continue et valorisante : les brevets Freinet
L’évaluation en pédagogie Freinet ne repose pas sur des notes, mais sur des outils favorisant la progression et l’auto-évaluation.
#### **Les brevets : une alternative aux évaluations classiques**
Inspirés du scoutisme de Baden Powell, les brevets sont des certifications de compétences acquises. Chaque élève progresse à son rythme et valide des compétences lorsqu’il se sent prêt. Ces brevets permettent de :
- Suivre l’évolution de chaque élève de manière individualisée.
- Valoriser les progrès et éviter la compétition liée aux notes.
- Encourager la persévérance et l’auto-évaluation.
Dans une classe Freinet, ces brevets couvrent toutes les disciplines : lecture, calcul, sciences, mais aussi des compétences plus transversales comme la coopération ou l’organisation du travail.
#### **L’auto-évaluation et le suivi collectif**
Outre les brevets, d’autres outils d’évaluation sont mis en place :
- **Le plan de travail**, où l’élève note ses avancées et objectifs.
- **Le bilan hebdomadaire**, discuté collectivement, qui permet de faire le point sur les apprentissages.
- **Le conseil de classe**, où élèves et enseignants analysent ensemble les difficultés et les réussites.
Ces dispositifs permettent une évaluation régulière et formative, centrée sur les progrès plutôt que sur la sanction.
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## 3. Concrètement, des outils pour la classe
### Mettre en place les brevets dans une classe Freinet
Pour intégrer les brevets dans une classe, il est possible de :
1. Définir des niveaux de compétences progressifs, en lien avec les attendus du programme.
2. Élaborer des fiches de brevets précisant les compétences à valider.
3. Organiser des temps réguliers où les élèves présentent leurs avancées.
4. Valoriser les réussites par une cérémonie de remise des brevets.
### Assurer un suivi des apprentissages sans notes
L’enseignant peut :
- Tenir un **cahier de suivi** où sont consignées les acquisitions de chaque élève.
- Organiser des **entretiens individuels** réguliers pour ajuster les objectifs.
- Utiliser des **grilles d’auto-évaluation**, où l’élève se positionne sur ses apprentissages.
### Favoriser la coopération dans l’évaluation
L’évaluation ne se fait pas uniquement par l’enseignant, mais aussi grâce aux pairs :
- Les élèves peuvent s’aider mutuellement à préparer un brevet.
- Les conseils de classe permettent d’analyser collectivement les difficultés rencontrées.
- Des activités comme le "cahier de progrès" encouragent la réflexion sur ses apprentissages.
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## Conclusion
La pédagogie Freinet ne rejette ni le programme scolaire ni l’évaluation, mais les aménage pour les rendre plus motivants et efficaces. Grâce aux brevets, aux plans de travail et à l’auto-évaluation, elle offre un cadre structuré où les élèves avancent selon leur rythme tout en respectant les exigences institutionnelles. Loin du cliché d’une école sans cadre, elle propose une évaluation exigeante mais bienveillante, centrée sur la réussite et la progression de chacun.
### Références et ressources
- **ICEM - Institut Coopératif de l'École Moderne** : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)
- **Freinet, C. (1964). "Les invariants pédagogiques".**
- **Baden Powell, R. (1908). "Scouting for Boys".**
- **Meirieu, P. (1998). "Apprendre... oui, mais comment ?"**
# Chapitre 3 : "Freinet rejetait totalement l’autorité de l’enseignant"
## 1. Présentation de l'idée reçue
Une critique souvent formulée à l’encontre de la pédagogie Freinet est qu’elle exclurait toute forme d’autorité de l’enseignant, le reléguant au rôle de simple accompagnateur sans pouvoir de direction. Cette perception repose sur une confusion entre la pédagogie Freinet et certaines approches libertaires, où l’enseignant se contente d’observer et d’intervenir le moins possible. Pourtant, une analyse rigoureuse des principes de la pédagogie Freinet montre une réalité bien différente.
### L'autorégulation et les modèles libertaires
Certaines expériences pédagogiques, comme celles inspirées par l'école de Summerhill ou la pédagogie Sudbury, prônent une absence quasi totale d’autorité de l’enseignant. Dans ces modèles, les élèves décident eux-mêmes des règles de vie et de leurs activités, sans intervention structurelle de l’adulte. Ce fonctionnement repose sur la confiance dans l’auto-organisation des enfants et des jeunes, qui seraient capables de réguler eux-mêmes leur environnement scolaire.
Or, si la pédagogie Freinet valorise la coopération et la participation active des élèves à la gestion de la classe, elle ne renonce pas pour autant à l’autorité de l’enseignant. Ce dernier joue un rôle décisif dans la mise en place d’un cadre structurant et dans l'accompagnement des élèves vers l'autonomie.
## 2. Qu'en est-il en réalité ?
La pédagogie Freinet repose sur une vision de l'autorité qui se distingue de la conception traditionnelle, où l'enseignant impose son savoir de manière verticale. Elle ne préconise pas une absence d'autorité, mais une autorité fondée sur la participation, la responsabilisation et la coopération. Tout ce qui peut être choisi et régulé par le conseil de classe doit l'être, c'est donc le groupe à qui chacun doit rendre compte en premier lieu.
### Les invariants de Freinet et l'autorité
Certains des **30 invariants pédagogiques** de Freinet permettent de mieux comprendre sa conception de l’autorité :
- **Invariant n°7 : "Chacun aime choisir son travail, même si ce choix n'est pas avantageux."** → L'apprentissage ne doit pas reposer sur une relation de domination, mais sur la motivation et la participation active de l'élève.
- **Invariant n°6 : "Nul n'aime être contraint à faire un certain travail, même si ce travail ne lui déplaît pas particulièrement. C'est la contrainte qui est paralysante."** → On comprend le fait qu'impliquer l'élève dans ses choix permet de partager l'autorité.
- **Invariant n°22 : "L'ordre et la discipline sont nécessaires en classe."** → On peut lire dans cet invariant la différence que Freinet pose entre autorité et autoritarisme : Dans un cas, la classe et chaque élève est au travail car il l'a choisit coopérativement, dans l'autre, c'est sous la contrainte de l'adulte que le travail est imposé à tous et chacun.
Dans cette approche, l’enseignant joue un rôle clé de régulateur et de garant du cadre scolaire. Il fixe les règles avec les élèves et assure leur respect, tout en les responsabilisant dans la gestion de la classe.
### Une autorité basée sur la coopération
Plutôt que d’exercer une autorité arbitraire, l’enseignant en pédagogie Freinet construit un cadre coopératif où chacun a un rôle à jouer. Il ne s’agit pas d’une démocratie totale, mais d’un système où les élèves prennent part à la gestion de la classe par des outils concrets.
## 3. Concrètement, des outils pour la classe
### Le conseil de classe : un cadre démocratique régulateur
Un des piliers de la pédagogie Freinet est le **conseil de classe**, où élèves et enseignant discutent des règles de vie, des difficultés rencontrées et des projets à mener. Loin d’être une absence d’autorité, ce dispositif permet une régulation collective qui renforce la responsabilisation des élèves.
### La ceinture de responsabilités : un cadre progressif
Inspiré du système des ceintures de judo, ce dispositif permet aux élèves de gagner progressivement en autonomie et en responsabilités selon leur niveau de maturité. L’enseignant reste garant de la progression et du respect des règles.
### L'évaluation coopérative et le rôle structurant de l'enseignant
Loin d'être absent, l'enseignant accompagne les élèves dans leur auto-évaluation et dans la mise en place de critères d'exigence. L'évaluation en pédagogie Freinet repose souvent sur des outils comme les brevets et les plans de travail, qui donnent un cadre rigoureux à l'apprentissage.
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### Conclusion
La pédagogie Freinet ne rejette pas l’autorité de l’enseignant, mais la repense dans une logique de coopération et de responsabilisation des élèves. Loin de l’image d’un enseignant absent ou passif, elle valorise un rôle actif où l’adulte structure les apprentissages tout en encourageant l'autonomie.
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### Références et ressources
- **ICEM - Institut Coopératif de l'École Moderne** : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)
- **Freinet, C. (1964). "Les invariants pédagogiques".**
- **Meirieu, P. (1998). "Apprendre... oui, mais comment ?"**
# Chapitre 4 : "Il n'existe qu'une seule bonne manière d'enseigner en pédagogie Freinet"
## 1. Présentation de l'idée reçue
Dans l'image d'épinal de la pédagogie Freinet, on retrouve des élèves en blouses épaisses tachées d'encre, coopérant pour monter des lignes sur les imprimeries à caractères mobiles en plomb, ou préparant les illustrations de leur journal en creusant dans des plaques de lino, sous l'oeil attentif et bienveillant de "Papa Freinet", comme il aimait se faire appeler. Selon cette perception, la classe Freinet se limiterait à l'application stricte des techniques d'imprimerie, du texte libre et du conseil de coopération, sans adaptation possible. Cette vision est réductrice et ne tient pas compte de la richesse des développements pédagogiques issus de cette approche, que les militants des mouvements de l'Ecole moderne ont contribué à faire avancer depuis la disparition du couple Freinet.
## 2. Qu'en est-il en réalité ?
### La pédagogie Freinet : une approche fondée sur les principes, pas sur des recettes
Freinet n'a jamais conçu sa pédagogie comme une méthode unique à suivre à la lettre, mais plutôt comme un ensemble de principes adaptables selon le contexte, les besoins des élèves et les contraintes institutionnelles. Les **30 invariants pédagogiques** de Freinet ne dictent pas une procédure unique, mais fournissent des repères permettant de repenser l'organisation de la classe.
Ces principes ne prescrivent pas un dispositif unique, mais encouragent à mettre en place un cadre où l'enfant est acteur de ses apprentissages. Ainsi, les classes Freinet peuvent adopter des formes variées selon les choix des enseignants et le contexte.
### La pédagogie institutionnelle : un prolongement structurant
Dans les années 1960, la **pédagogie institutionnelle**, portée notamment par Fernand Oury et Aida Vasquez, a introduit une réflexion plus approfondie sur les institutions de la classe (conseils, règles, ceintures de responsabilité) en s'inspirant des travaux de la psychothérapie institutionnelle. Ce courant, issu de la pédagogie Freinet, met l'accent sur les dispositifs de régulation collective et l'implication des élèves dans la gestion du groupe.
La pédagogie institutionnelle n'est pas une remise en question de la pédagogie Freinet, mais une autre manière d'organiser la classe en s'appuyant sur des outils tels que :
- **Le conseil de coopération** pour réguler la vie de la classe.
- **Les ceintures de comportement et de responsabilité** inspirées du judo.
- **Les métiers de la classe**, permettant aux élèves de prendre en charge certaines tâches collectives.
### L'approche de Bernard Collot et la "classe multi-âges autogérée"
Bernard Collot, en s'inscrivant dans la lignée de la pédagogie Freinet, a développé le concept de **classe multi-âges autogérée**, qui pousse encore plus loin l'idée d'un environnement auto-organisé par les élèves. Il introduit la notion de langages au sein de sa classe qui est un environnement complexe, mais sans être compliqué. Il parle de "simplexité". Il prône une structure de classe où :
- Les enfants organisent eux-mêmes leurs apprentissages.
- Les supports et outils sont à disposition pour favoriser l'autonomie.
- L'enseignant joue un rôle de facilitateur et d'accompagnateur.
Son approche met en avant la liberté de l'élève dans ses apprentissages tout en maintenant une structuration forte du cadre scolaire.
## 3. Une diversité de pratiques au sein des classes Freinet
La pédagogie Freinet se caractérise donc par une grande variété de mises en œuvre. Certains enseignants privilégient les **techniques classiques** de Freinet (texte libre, correspondance scolaire, imprimerie), d'autres s'inspirent de la pédagogie institutionnelle, tandis que d'autres encore adoptent une approche proche de celle de Bernard Collot.
Ce qui unit ces différentes pratiques, c'est la recherche d'une école plus respectueuse du rythme et de la motivation de l'enfant, et non un modèle unique figé.
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### Conclusion
Loin d'imposer une unique manière d'enseigner, la pédagogie Freinet est un cadre souple qui favorise l'expérimentation et l'adaptation. De la pédagogie institutionnelle aux classes multi-âges de Bernard Collot, de nombreuses pratiques coexistent, toutes guidées par le même objectif : rendre l'enfant acteur de ses apprentissages.
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### Références et ressources
- **ICEM - Institut Coopératif de l'École Moderne** : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)
- **Freinet, C. (1964). "Les invariants pédagogiques".**
- **Oury, F. & Vasquez, A. (1971). "Vers une pédagogie institutionnelle".**
- **Collot, B. (2016). "L'école du 3e type".**
# Chapitre 5 : "L’imprimerie et le texte libre sont dépassés"
## 1. Présentation de l'idée reçue
Dans un monde où le numérique occupe une place centrale, certains considèrent que les outils emblématiques de la pédagogie Freinet – l’imprimerie et le texte libre – sont devenus obsolètes. Ces pratiques, développées dans un contexte où les moyens de communication étaient limités, seraient aujourd’hui inutiles face aux possibilités offertes par les technologies modernes. Cette critique repose sur une confusion entre l’outil et le principe pédagogique sous-jacent.
Si l'on relit Freinet, dans la Brochure d'éducation nouvelle populaire"le texte libre" :
> Un texte libre doit être vraiment libre. C'est-à-dire qu'on l'écrit lorsqu'on a quelque chose à dire, lorsqu'on éprouve le besoin d'exprimer, par la plume et le dessin, ce qui bouillonne en nous. L'enfant écrira son texte spontané sur un coin de la table le soir, sur ses genoux en écoutant parler la grand'mère qui ressuscite pour lui les histoires du temps passé, sur le cartable avant d'entrer en classe, et aussi, naturellement, pendant les heures de travail libre que nous réserverons dans notre emploi du temps.
> Alors, nous aurons la certitude que les textes obtenus seront ceux qui ont le plus agité les enfants, qui les ont intéressés le plus profondément, ceux donc qui auront la plus éminente vertu pédagogique.
On peut comprendre que le texte libre est donc loin d'être simplement une rédaction à sujet libre, imposée par l'adulte. Le but est de créer un environnement dans la classe où l'élève n'aura finalement pas d'autre choix que de se mettre à écrire, car ça deviendra pour lui un besoin vital d'expression, de communication, d'explication, d'organisation ou de mémoire du vécu de la classe.
## 2. Qu'en est-il en réalité ?
### Pourquoi Freinet avait-il choisi ces outils ?
Freinet a introduit l’imprimerie à l’école pour permettre aux élèves de s'exprimer, écrire, publier et partager leurs productions. Ces imprimeries portables, qui permettait à un commerçant ou à un syndicat d'imprimer à peu de frais et de façon artisanale des tracts ou des publicités sur un petit format (équivalent à du A5) était une invention récente à l'époque où il l'adopta pour sa classe.
Les textes, élus quotidiennement parmi les productions des élèves, toilettés, puis imprimés, rejoignaient le cahier de vie de chacun des élèves, qui construisaient alors leur propre "manuel" de lecture qui rendait compte du vécu de la classe tout au long de l'année.
Loin d’être une simple activité technique, ce processus visait plusieurs objectifs pédagogiques :
- **Donner du sens à l’écrit** : écrire pour être lu, et non pas pour une correction professorale ou pour répondre seulement à une demande de l'enseignant.
- **Favoriser l’expression libre des élèves** : leur permettre d’écrire sur ce qui les intéresse et les motive, au moment où ils le choisissent dans l'organisation coopérative de la classe.
- **Développer une culture de coopération** : les élèves travaillent ensemble à la relecture, la mise en forme et la publication de leurs textes.
- **Responsabiliser les élèves** : Selon les choix opérés, ils doivent respecter des contraintes techniques et éditoriales, notamment pour la publication dans le journal, dans une lettre, ce qui structurait leur pensée et leur rapport à l’écrit.
Quant au texte libre, il constituait une pratique essentielle pour libérer la parole des élèves et favoriser leur engagement dans l’écrit. Il s’inscrivait dans une vision de l’apprentissage où l’expression personnelle et la créativité occupaient une place centrale à une époque où dans beaucoup de familles et de classes, l'enfant était encore considéré selon son éthymologie : "Celui qui ne parle pas".
### La pérennité des principes pédagogiques
Si l’imprimerie traditionnelle n’est plus que rarement utilisée dans les classes, les principes pédagogiques qui la sous-tendaient restent pleinement d’actualité. Loin d’être dépassés, ils trouvent aujourd’hui de nouvelles applications grâce aux outils numériques :
- **La correspondance scolaire**, qui visait à donner un véritable destinataire aux écrits des élèves, peut être renouvelée par l’échange de courriers électroniques ou la participation à des projets collaboratifs en ligne.
- **Le texte libre**, qui encourageait l’écriture personnelle et collective, peut s’exprimer sur un blog de classe, un journal en ligne ou même des réseaux sociaux pédagogiques.
- **L’imprimerie et la diffusion**, qui donnaient du sens à l’écrit, trouvent un prolongement naturel dans l’édition numérique (PDF, e-books, sites web).
Ainsi, ce n’est pas l’imprimerie elle-même qui importe, mais le fait d’écrire pour être lu, de publier et de partager dans un cadre coopératif.
## L'objet "imprimerie" et la coopération
Par rapport à l'objet imprimerie, l'une des caractéristique de l'activité est qu'elle induit naturellement une façon de travailler : quand on observe des élèves, surtout dans les petites classes, qui sont en train de monter un texte avec une imprimante portable, on se rend compte que la coopération est indispensable :

En effet, la tâche est bien trop complexe, il y a trop d'étapes à mener pour qu'un élève de maternelle ou de cycle 2 puisse la mener à bien seul. Alors, les rôles s'organisent, entre celui qui tiendra le texte corrigé par l'enseignant pour le dicter aux autres, celle qui ira chercher la bonne lettre dans la casse, celui qui vérifiera avec un miroir, entre le B, le D, le Q ou le P laquelle à été choisie... Le temps se ralentit quand on utilise une imprimerie à caractères en plomb. Et c'est autant de temps passé en s'interrogeant sur les lettres, leur forme, leur son, l'ordre dans les mots, la construction de la phrase, sa ponctuation, qui permettent d'organiser ce temps essentiel de métacognition sur l'écrit de la méthode naturelle d'écriture-lecture.
## 3. Concrètement, des outils pour la classe
### Quand on n'a pas d'imprimerie ?
Un des buts de l'imprimerie, quand elle fut adoptée dans les techniques Freinet, était de valoriser une production d'élève au même niveau d'impression de ce que l'on pouvait seulement obtenir jadis dans un livre. A l'heure actuelle, les imprimantes s'étant généralisées, on peut imaginer qu'un élève n'est pas émerveillé de voir ses écrits sur une page blanche en caractère d'imprimerie. Mais organiser le travail autour d'une façon d'imprimer reste intéressant par les possibilités d'apprentissage offertes dans le cercle vertueux de la méthode naturelle d'écriture-lecture.
Des imprimeries basée sur un système d'imbrication des lettres permettent de retrouver un semblant d'imprimerie mobile.

On peut également trouver, dans certaines enseignes ou en ligne, des "tampons lettres", qui, s'ils ne présentent pas l'avantage de se coller les uns aux autres, organisent le travail en petit groupe et le tâtonnement expérimental.
[](https://minio.apps.education.fr/codimd-prod/uploads/upload_3994c87609c9be2b8f419044c11db684.jpg)
On peut retrouver un certain nombre d'outils qui permettent de remettre les élèves en
### Correspondance et échange numérique
- Mettre en place un **blog de classe** pour publier les productions des élèves.
- Échanger avec d’autres classes via des **projets collaboratifs en ligne**.
- Utiliser des plateformes comme **eTwinning** pour favoriser les échanges internationaux.
### Texte libre et valorisation des écrits
- Créer un **journal de classe numérique** où les élèves publient régulièrement.
- Organiser des **ateliers d’écriture collaboratifs** en ligne.
- Permettre aux élèves d’**enregistrer leurs textes en podcast** pour enrichir leur diffusion.
### Édition et diffusion
- Utiliser des outils comme **Canva ou Book Creator** pour éditer et mettre en page les textes des élèves.
- Expérimenter la création de **livres numériques** ou de recueils de textes accessibles en ligne.
- Organiser des **expositions virtuelles** où les productions des élèves sont mises en valeur.
## Conclusion
Loin d’être dépassés, l’imprimerie et le texte libre restent des piliers de la pédagogie Freinet, mais sous d’autres formes. Les outils numériques offrent aujourd’hui des possibilités accrues pour prolonger ces pratiques en s’adaptant aux réalités contemporaines. Ce qui compte, ce n’est pas l’outil en lui-même, mais l’esprit dans lequel il est utilisé : favoriser l’expression, donner du sens aux apprentissages et développer la coopération.
## Références et ressources
- **ICEM - Institut Coopératif de l'École Moderne** : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)
- **Freinet, C. (1964). "Les invariants pédagogiques".**
- **Bernard, M. (2002). "Le texte libre aujourd’hui".**
# Chapitre 6 : "Les classes Freinet sont réservées aux enfants de milieux favorisés"
## 1. Présentation de l'idée reçue
La pédagogie Freinet est parfois perçue comme une approche élitiste, réservée aux enfants issus de milieux favorisés. Cette idée repose sur l’image d’une éducation alternative nécessitant des ressources spécifiques et une forte implication des familles. Certains estiment que les pratiques coopératives et l’autonomie des élèves supposent un capital culturel élevé, excluant de fait les enfants issus de milieux populaires. Pourtant, l’histoire et la pratique actuelle de la pédagogie Freinet montrent une réalité bien différente.
## 2. Qu'en est-il en réalité ?
### Un ancrage historique dans les classes populaires
Loin d’être une pédagogie pensée pour une élite, la pédagogie Freinet est née d’un engagement profond en faveur des enfants des classes populaires. Dès les années 1920, Célestin Freinet, issu lui-même d’un milieu modeste, enseigne dans des écoles rurales où il cherche à proposer une éducation plus juste et plus adaptée aux réalités des élèves. Son approche repose sur des techniques facilitant l’apprentissage pour tous, indépendamment de leur origine sociale.
Pendant la guerre civile espagnole, Élise et Célestin Freinet accueillent dans leur école de Vence des enfants réfugiés, souvent en grande difficulté. Ils mettent en place des pratiques pédagogiques visant à reconstruire leur confiance en eux et leur permettre de s’exprimer librement. Cet engagement montre clairement que la pédagogie Freinet n’a jamais été pensée comme réservée aux privilégiés, mais bien comme une éducation émancipatrice pour tous.
### L’expérience du laboratoire Théodile et la diversité sociale
L’idée selon laquelle la pédagogie Freinet serait réservée à une élite a été contredite par plusieurs études, notamment celle menée par le chercheur Yves Reuter, directeur du laboratoire Théodile, à l’école Hélène Boucher à Mons-en-Barœul située en zone d’éducation prioritaire (Reuter, 2007). Cette recherche a montré que les pratiques Freinet sont tout à fait adaptées aux élèves de milieux défavorisés et peuvent favoriser leur réussite et jouer positivement sur le climat scolaire. Parmi les observations principales :
- Une meilleure implication des élèves dans les apprentissages grâce aux dispositifs coopératifs.
- Une réduction des écarts entre élèves en difficulté et élèves plus avancés.
- Une motivation accrue, notamment grâce aux projets collectifs et aux outils d’auto-évaluation.
- Un climat scolaire plus serein, car des instances de régulation des conflits avaient été institutionnalisées.
Cette étude a démontré que la pédagogie Freinet pouvait non seulement fonctionner en milieu populaire, mais aussi être un levier puissant pour réduire les inégalités scolaires.
## 3. Concrètement, des outils pour une pédagogie inclusive
### Des dispositifs favorisant l’équité
La pédagogie Freinet repose sur des outils qui permettent à tous les élèves de progresser à leur rythme :
- **Le travail individualisé et les plans de travail**, qui permettent à chaque élève d’avancer selon ses besoins.
- **Les conseils de classe**, qui donnent une place active aux élèves dans l’organisation de la vie scolaire.
- **L’évaluation coopérative**, qui valorise les progrès et non la compétition.
### Une pédagogie accessible sans moyens disproportionnés
Contrairement à certaines idées reçues, la pédagogie Freinet ne nécessite pas d’investissement matériel coûteux. Si l’imprimerie scolaire a marqué les débuts du mouvement, les classes Freinet d’aujourd’hui utilisent des outils variés et adaptables, notamment le numérique pour prolonger les pratiques coopératives.
### Un modèle reconnu dans l’institution
La pédagogie Freinet et ses pédagogues se sont toujours revendiqués du système éducatif français public, notamment à travers les réseaux d’écoles utilisant ses principes, mais aussi des enseignants travaillant en pédagogie Freinet de façon isolée dans des écoles publiques. Les enseignants peuvent s former via l’ICEM et d’autres structures, ce qui permet une diffusion accessible de ces pratiques.
## Conclusion
Loin d’être réservée aux enfants favorisés, la pédagogie Freinet a toujours eu pour ambition de proposer une éducation émancipatrice pour tous. Les recherches menées en milieu défavorisé montrent que ses principes favorisent la réussite de tous les élèves, notamment ceux issus de milieux populaires. Cette approche repose sur des pratiques accessibles, adaptées aux réalités des classes hétérogènes, et constitue un levier puissant pour lutter contre les inégalités scolaires.
## Références et ressources
- **ICEM - Institut Coopératif de l'École Moderne** : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)
- **Reuter, Y. (2007). "Une école Freinet : Fonctionnements et effets d’une pédagogie alternative en milieu populaire". Presses Universitaires du Septentrion.**
# Chapitre 7 : "Freinet rejetait tout enseignement explicite"
## 1. Présentation de l'idée reçue
Une critique récurrente adressée à la pédagogie Freinet est qu’elle est l'exact inverse de l’enseignement explicite. Selon cette vision, les classes Freinet fonctionneraient uniquement sur le mode de la découverte autonome, sans interventions structurées de l’enseignant. Cette idée repose sur une confusion entre la méthode naturelle, basée sur le tatônnement expérimental, et l'image caricaturale qu'ont pu véhiculer certains adeptes d'autres méthodes, qualifiant cette pédagogie de "pédagogie de la devinette". Cependant, en pédagogie Freinet, on est loin d'une approche à l'aveugle d'un enseignant qui laisserait ses élèves tatônner sans carte ni boussole.
## 2. Qu’en est-il en réalité ?
Nous devons d'abord définir ce qu'est la pédagogie explicite, afin de mieux comprendre ce qu'implique cette idée reçue.
### L’enseignement explicite : définitions et enjeux
L'enseignement explicite n'est pas une notion récente. On la retrouve dans le référentiel pour l'éducation prioritaire, son but est de mettre en réussite tous les élèves, mais particulièrement ceux qui sont le plus éloigné de la culture scolaire. Pierre Bourdieu parlait déjà de "pédagogie rationnelle" pour lutter contre la reproduction sociale. On sait depuis des années que l'école à tendance à reproduire les inégalités sociales, voire, dans certains cas, à les amplifier. Il serait donc contre productif pour un enseignant de refuser d'enseigner plus explicitement. Cependant, comme le souligne Philippe Meirieu dans un article des cahiers pédagogiques, la notion porte une ambiguité risquée.
## Une ambiguité risquée
Selon l'école nord-américaine, représentée par les travaux de Bissonnette et coll. (2010), l’enseignement explicite repose sur une approche structurée de la transmission des savoirs, avec une forte guidance de l’enseignant. il se caractérise par plusieurs étapes clés :
- L’activation des connaissances antérieures,
- La démonstration et la modélisation par l’enseignant,
- La pratique guidée avec rétroaction immédiate,
- La pratique autonome avec supervision progressive.
En France, l’Institut Français de l’Éducation (IFE) souligne que l’enseignement explicite vise à rendre les apprentissages accessibles à tous en structurant la progression des élèves et en veillant à leur engagement cognitif. Le principe est de déjouer ce qui est implicite dans une tâche proposée à l'élève en rendant explicite ce qui est attendu de lui dans cette tâche, ainsi que les enjeux d'apprentissage : quelle compétence il est en train de développer par cette tâche. Stéphane Bonnery a donné l'exemple d'Amidou, qui était persuadé d'avoir réussi son travail en géographie car il avait colorié correctement sa carte. Il n'avait pas saisi l'enjeu d'apprentissage, trop éloigné de la culture scolaire, et voulant rentrer dans un contrat didactique visant à répondre simplement à la consigne et faire plaisir à son enseignant.
### Freinet et l’explicitation des apprentissages
Freinet n’a jamais prôné une pédagogie où l’enseignant serait totalement absent du processus d’apprentissage. Au contraire, il insistait sur la nécessité d’accompagner l’élève dans ses découvertes, en proposant des outils et un cadre structurant.
Dans l'organisation du travail en pédagogie Freinet, on peut voir que chaque élève sait quelle compétence il est en train de developper. Il peut observer les élèves plus avancés que lui, leur démander de l'aide, et l'enseignant peut lui faire un retour très régulièrement sur son travail. Le fait de faire le point régulièrement, puis en fin de plan de travail pour le réajuster, valider certaines compétences ou prolonger le travail d'entrainement sur d'autres notions permet l'explicitation des objectifs d'apprentissages auprès de tous.
## 3. Concrètement, des outils pour la classe
### Structurer les apprentissages
- Utiliser les **plans de travail** comme outils de progression individualisée tout en maintenant un cadre explicite.
- Pratiquer l’**enseignement réciproque**, où les élèves reformulent et explicitent leurs stratégies d’apprentissage.
- Alterner des moments d’**enseignement dirigé** avec des phases de recherche et de mise en projet.
### Donner du sens aux apprentissages
- Favoriser la **production de textes libres** suivie d’une analyse collective guidée par l’enseignant.
- Mettre en place des **ateliers de mathématiques** où la manipulation est accompagnée d’explications structurées.
- Utiliser la **correspondance scolaire** pour contextualiser l’apprentissage de l’écrit dans une démarche explicite et motivante.
## Conclusion
Loin de rejeter l’enseignement explicite, qui n'avait pas forcément été théorisée au moment où l'école moderne mettait en place ses techniques, la pédagogie Freinet intègre des moments de structuration des apprentissages, mais dans une approche qui vise à donner du sens aux savoirs. En mettant l’élève en activité tout en lui offrant un cadre structurant, elle rejoint de nombreuses recommandations issues des recherches en didactique et en sciences cognitives.
## Références et ressources
- **Bissonnette, S., Richard, M., Gauthier, C., & Bouchard, C. (2010). "L’enseignement explicite : Une pratique efficace".**
- **IFE (Institut Français de l’Éducation). "L’enseignement explicite : Principes et mise en œuvre en classe".**
- **ICEM - Institut Coopératif de l’École Moderne : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)**
# Chapitre 8 : "La méthode naturelle de lecture est simplement la méthode globale"
## 1. Présentation de l'idée reçue
La méthode naturelle de lecture, développée dans le cadre de la pédagogie Freinet, est souvent assimilée à une approche strictement globale de l’apprentissage de la lecture. Certains détracteurs affirment qu’elle néglige le décodage des graphèmes et plonge les élèves dans une confusion préjudiciable à l’apprentissage de la lecture. On a même pu lire dans certaines publications officielles que certaines méthodes "créaient des troubles", comme si l'on pouvait devenir porteur d'une dyslexie ou d'une dysphasie par l'action d'un enseignant. Cette critique repose sur une méconnaissance des principes réels de la méthode naturelle, basée sur le tatonnement expérimental, les techniques de la classe coopérative et de l'articulation avec les processus cognitifs de l’apprentissage de la lecture.
## 2. Qu'en est-il en réalité ?
### La méthode naturelle de lecture en pédagogie Freinet.
Inspirée des processus d’acquisition du langage oral, la méthode naturelle de lecture repose sur l’idée que l’apprentissage de l’écrit doit être aussi fonctionnel et motivé que l’apprentissage de la parole. Contrairement à ce que suggère l’amalgame avec la méthode globale, elle ne rejette ni le travail sur le code écrit ni les mécanismes de déchiffrage.
Danielle de Keyzer, dans ses travaux sur la méthode naturelle, insiste sur l’importance de partir des productions des élèves pour construire progressivement les apprentissages. L’enfant, confronté à des écrits porteurs de sens, développe des stratégies de lecture qui intègrent à la fois le décodage et la compréhension.
La méthode naturelle de lecture ne peut cependant pas être vraiment classée dans un type de méthode qui sont généralement opposées. Mais nous devons faire un point sur ces différentes approches, pour clarifier notre propos.
### Un rappel sur les différentes méthodes de lecture
De récents travaux en neuroscience permis par les progrès de l'imagerie cérébrale tendent à vouloir valider certaines gestes enseignants. Cependant, plusieurs chercheurs, dont Dominique Bucheton, chercheuse qui s'est spécialisée dans ces gestes, remettent en question ce qui pourrait être qualifié de scientisme :
> La validité scientifique de ce retour à la vieille syllabique de nos grands-parents, quoiqu’en disent deux ou trois scientifiques affidés du ministre, est fortement questionnée non seulement par l’ensemble de la communauté des chercheurs dans diverses disciplines linguistiques : psychologie sociale, sociologie, didactique du français qui depuis plus de quarante ans s’intéressent à l’écrit . Mais elles semblent aussi bien fragiles au regard de l’état de la recherche en neurosciences (voir les très nombreuses publications et vulgarisations actuelles de ces travaux).
> "Mais enfin, apprendre à lire, c'est quoi ?" Dominique Bucheton
Il existe plusieurs approches de l’enseignement de la lecture, parmi lesquelles :
- **La méthode syllabique** : centrée sur le déchiffrage, elle enseigne de manière explicite les correspondances graphèmes-phonèmes dans un premier temps, en ménageant d'autres temps pour enseigner la compréhension. On considère que pour que la majorité des élèves apprenne à lire et éviter les flous cognitifs, on ne doit présenter aux élèves seulement des textes contenant des graphèmes qui ont déja été étudiés explicitement en classe.
- **La méthode globale** : Cette méthode, ancrée dans les travaux de Jean Foucambert, propose aux élèves d’apprendre à reconnaître directement des mots entiers, en s’appuyant sur la mémoire visuelle de leur silhouette et le contexte du texte.
- **La méthode mixte** : Cette approche combine les approches syllabiques et globales pour articuler le décodage et la compréhension. On utilise en début d'année un certain nombre de mots-outils que l'élève doit connaitre par coeur, car il n'a pas encore la capacité de déchifrer ces mots.
- **La méthode naturelle** : issue de la pédagogie Freinet, elle repose sur une immersion dans des écrits fonctionnels et signifiants, en intégrant progressivement les éléments du code écrit au travers de l’expérience et des besoins des élèves. En réalité, le processus d'apprentissage de la lecture en classe Freinet repose sur des interactions entre l'écrit et la lecture. Les travaux d'Emilia FERREIRO ont montré que les élèves apprennent à écrire avant d'apprendre à lire. La méthode naturelle d'écriture-lecture mettent donc en valeur ce cercle vertueux. Comme nous l'avons abordé sur le chapitre autour du texte libre, le fait d'imprimer le texte, dans un processus coopératif (atelier d'imprimerie, taper son texte à l'ordinateur à 2 ou 3) contribue positivement à l'apprentissage de la lecture en méthode naturelle.
### Lecture et compréhension : ce que disent les recherches
Les travaux de Stanislas Dehaene (2011) sur les mécanismes de la lecture montrent que l’apprentissage passe par deux voies complémentaires : une voie lexicale, qui permet de reconnaître les mots familiers, et une voie phonologique, essentielle pour décoder les mots inconnus. Un enseignement efficace de la lecture ne peut donc se limiter à une approche strictement syllabique ou globale : il doit articuler déchiffrage et mise en lien avec le vocabulaire et les connaissances préalables de l’élève.
Des études en didactique de la lecture (Goigoux et Cèbe, 2015) ont également souligné que la compréhension ne découle pas automatiquement du décodage. Une méthode efficace doit donc intégrer un travail explicite sur la compréhension dès les premières étapes de l’apprentissage.
Ainsi, la méthode naturelle ne saurait être réduite à une méthode globale : elle s’appuie sur un environnement riche en écrits pour permettre aux élèves de développer conjointement leurs capacités de décodage et de compréhension, et elle semble correspondre totalement aux récents travaux sur l'apprentissage de la lecture.
## 3. Concrètement, des outils pour la classe
### Valoriser l’écrit fonctionnel
- Mettre en place un **mur d’écrits** où les productions des élèves, les textes qui ont été étudiés en classe, les affiches des sorties, les lettres des correspondants sont affichées et réutilisées comme supports d’apprentissage. Chaque élève peut ensuite se référer à ce corpus commun pour retrouver une phrase, une expression, l'orthographe d'un mot...
- Favoriser l’**écriture de textes libres**, où les élèves produisent leurs propres textes, qui servent ensuite de base pour travailler le code écrit.
- Introduire un **cahier de vie**, où les élèves racontent leurs expériences et développent progressivement des compétences en lecture et écriture. Cette approche, basée sur les **Albums échos** de Philippe Boisseau, a largement démontré sa pertinence.
- Mettre en place une **correspondance entre classes** par voie postale ou électronique. Cela peut aussi prendre la forme d'un **blog**, d'un fil sur un **réseau social**, qui permettent également de construire des compétences en Education aux Média et à l'Information (EMI).
### Articuler décodage et compréhension
- Utiliser des **dictées à l’adulte** pour permettre aux élèves d’écrire des textes qui leur sont signifiants. Cet outil, qui a été largement théorisé et enseigné en formation d'enseignants est malheureusement souvent réduit à tort à une utilisation en maternelle. La dictée à l'adulte est un puissant levier pour que l'élève produise des textes juste en dehors de sa zone proximale de développement, texte qu'il rajoutera à son propre corpus de textes de références.
- Proposer des **ateliers de lecture orale et silencieuse**, en veillant à travailler aussi bien le déchiffrage que l’interprétation du texte. La lecture de ses **textes libres** à la classe, en vue d'amélioration, peut donner lieu à des entrainements et permet la valorisation du travail des élèves. Chez les autres élèves, l'écoute d'un texte encourage à la compréhension pour déceler ce qui est cohérent, ou les manquements dans le texte qui leur est lu.
- Mettre en place des **toilettage de textes** pour aider les élèves à développer des stratégies de compréhension et encourager à comprendre les corrections dans un texte, en "mettant un haut parleur" sur sa pensée, ce qui permet de faire un retour métacognitif sur le texte.
### Exploiter les outils numériques
- Les élèves peuvent utiliser des **applications de dictée vocale** ou des **IA** pour aider à la production d’écrits.
- Mettre en place un **blog de classe**, où les élèves publient leurs textes et lisent ceux des autres. Des enseignants ont un compte de classe sur des réseaux sociaux, ou utilisent des Espaces Numériques de Travail (ENT) proposant un système de blog.
- Explorer ou produire des **livres numériques interactifs**, qui permettent une approche multisensorielle de la lecture. Des applications permettent d'oraliser la lecture d'un livre, soutenant la compréhension d'un élève faible dechiffreur (ce que les travaux de Michel Fayol et Jocelyne Giasson confirment).
## Conclusion
Comme nous avons pu le voir, la méthode naturelle de lecture ne se limite pas à une approche globale, mais repose sur une construction progressive du savoir lire, en intégrant à la fois le sens et le code écrit et en encourageant la posture d'auteur de chaque élève, mettant en place un cercle vertueux de production de textes fortement ancré dans le vécu de la classe pour ensuite motiver la lecture. Les avancées récentes en sciences cognitives confirment l’importance d’articuler déchiffrage et compréhension, ce que la pédagogie Freinet met en œuvre par une immersion dans des écrits authentiques et motivants et en mettant les élèves en position de producteurs de textes. En s’adaptant aux besoins et aux rythmes des élèves, elle est une approche pertinente et efficace pour l’apprentissage de la lecture.
## Références et ressources
- **ICEM - Institut Coopératif de l'École Moderne** : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)
- **Dehaene, S. (2011). "Les neurones de la lecture". Odile Jacob.**
- **Goigoux, R., & Cèbe, S. (2015). "Apprendre à lire : études et pratiques". Presses Universitaires de Rennes.**
- **De Keyzer, D. (2001). "Lire et écrire en pédagogie Freinet". ICEM Éditions.**
- **Feirrero, E. (2000). "L'Ecriture avant la lettre". Hachette.**
- **Daniel Gaonac’h, Michel Fayol (2003), Aider les élèves à comprendre, du texte au multimédia, Hachette
Éducation.**
-**Jocelyne Giasson, La lecture. Apprentissage et difficultés, De Boeck, 2013.**
# Chapitre 9 : "La pédagogie Freinet est incompatible avec l’institution scolaire actuelle"
## 1. Présentation de l'idée reçue
Il est courant d'entendre que la pédagogie Freinet serait en opposition totale avec l'institution scolaire actuelle. Ses principes de coopération, d'autonomie et d'expression libre des élèves seraient difficilement conciliables avec les contraintes institutionnelles, notamment les programmes, les évaluations et l'organisation traditionnelle des classes. Cette perception repose souvent sur une méconnaissance des fondements de la pédagogie Freinet et de ses évolutions dans le cadre de l'école publique.
## 2. Qu'en est-il en réalité ?
### Une pédagogie qui s'inscrit dans l'école publique et l'Education nationale
Contrairement à cette idée reçue, la pédagogie Freinet a toujours été pensée comme une pédagogie applicable au sein de l'école publique. Célestin Freinet lui-même était instituteur et a développé ses outils et techniques pour améliorer l'enseignement dans un cadre institutionnel. Suite à de nombreux épisodes d'intimidation, de sa hiérarchie ou de notables des villages dans lesquels il exerçait avec Elise, il a été contraint de démissionner de l'Education nationale pour créer sa propre structure à Vence, qui existe encore de nos jours (cette école a été réintégrée au sein de l'Education nationale en 1991). Aujourd’hui, de nombreuses classes fonctionnant selon les principes de la pédagogie Freinet sont intégrées à l'Éducation nationale, en France comme à l'étranger.
### Adaptation aux contraintes institutionnelles
Les enseignants pratiquant la pédagogie Freinet respectent les programmes officiels tout en adoptant des démarches plus coopératives et autonomisantes. Ils utilisent des outils comme le texte libre, l’imprimerie, la correspondance scolaire ou encore les plans de travail pour répondre aux attentes institutionnelles tout en respectant les principes de Freinet.
De plus, plusieurs textes officiels, notamment ceux sur l'évaluation bienveillante, l'apprentissage par projet ou encore l'éducation à la citoyenneté, offrent des points d’appui aux pratiques Freinet.
## 3. Concrètement, des outils pour la classe
### Mise en œuvre dans l’institution
- **Texte libre et expression écrite** : Permet de travailler la production d’écrit tout en respectant les attendus des programmes.
- **Plan de travail** : Un outil structurant qui permet aux élèves d'avancer à leur rythme tout en assurant l'acquisition des compétences exigées.
- **Conseil de classe** : Développe l’autonomie et la coopération, des compétences valorisées par l’Éducation nationale.
- **Évaluation par brevets et auto-évaluation** : Une alternative aux évaluations classiques, tout en restant compatible avec les attentes institutionnelles.
## Conclusion
La pédagogie Freinet n’est pas une pédagogie en opposition avec l’école, mais une approche qui permet d’enseigner autrement, tout en respectant les exigences institutionnelles. De nombreux enseignants parviennent à concilier ces pratiques avec le cadre officiel, prouvant ainsi que Freinet et institution scolaire ne sont pas incompatibles.
## Références et ressources
- **ICEM - Institut Coopératif de l'École Moderne** : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)
- **Freinet, C. (1964). "Les invariants pédagogiques".**
- **Bonnéry, S. (2015). "L’école et les pédagogies alternatives".**
# Chapitre 10 : "C’est une pédagogie du passé, dépassée par les découvertes en sciences de l’éducation"
## 1. Présentation de l'idée reçue
Une critique fréquente à l’encontre de la pédagogie Freinet est qu’elle serait une approche dépassée, élaborée au début du XXe siècle et inadaptée aux connaissances actuelles en sciences de l’éducation. Certains estiment que ses principes relèvent d’une vision empirique, voire intuitive, qui ne tiendrait pas compte des recherches contemporaines sur l’apprentissage, notamment en psychologie cognitive. Selon cette vision, les avancées en neurosciences et en didactique auraient invalidé des éléments centraux de la pédagogie Freinet, comme la méthode naturelle d’apprentissage, l’autonomie des élèves et le travail coopératif.
## 2. Qu'en est-il en réalité ?
### Des principes confirmés par la recherche contemporaine
Loin d’être une pédagogie obsolète, la pédagogie Freinet trouve aujourd’hui des appuis solides dans les recherches en sciences de l’éducation. De nombreuses études viennent conforter les intuitions de Freinet sur l’apprentissage.
- **L’importance de l’engagement actif** : Les travaux de Stanislas Dehaene (2018) ont montré que l’apprentissage est renforcé lorsque l’élève est acteur de ses apprentissages. Cela rejoint le principe freinetien du tâtonnement expérimental, où l’élève construit ses savoirs à travers l’expérimentation et l’expression personnelle.
- **La coopération comme levier d’apprentissage** : Les recherches en psychologie sociale et cognitive (Damon & Phelps, 1989 ; Slavin, 1996) ont mis en évidence les bénéfices de l’apprentissage coopératif, élément central des classes Freinet avec les conseils coopératifs, la correspondance scolaire et le travail en groupe.
- **L’importance du sens dans les apprentissages** : Des travaux en motivation scolaire (Deci & Ryan, 2000) ont démontré que donner du sens aux apprentissages favorise l’engagement et la persévérance des élèves. La pédagogie Freinet, en partant des centres d’intérêt des enfants et en proposant des projets concrets, s’inscrit dans cette logique.
- **La différenciation pédagogique** : L’individualisation des parcours, permise par les plans de travail et l’auto-évaluation en classe Freinet, rejoint les principes de l’enseignement explicite et de la différenciation recommandés par les recherches didactiques (Meirieu, 2007 ; Connac, 2021).
### Une pédagogie qui intègre les avancées scientifiques
La pédagogie Freinet n’est pas figée. Elle évolue avec le temps et s’adapte aux nouvelles connaissances fournies par la science. De nombreux praticiens Freinet intègrent aujourd’hui les apports des sciences cognitives en structurant davantage les apprentissages, tout en conservant les principes fondamentaux de coopération et d’autonomie. Le chercheur Olivier Houdé explique ce que Freinet et ses camarades avaient trouvé et théorisé, empiriquement, était validé par les récentes découvertes permises par les progrès de l'imagerie cérabrale.
On voit également des enseignants utiliser des moyens modernes d'expression, comme les réseaux sociaux, pour atteindre les buts des invariants.
Par exemple :
- L’utilisation des outils numériques permet d’enrichir les techniques d’expression libre et de correspondance scolaire.
- L’évaluation formative et les brevets permettent de mieux suivre les acquisitions des élèves, en complément d’un suivi plus individualisé. La conférence de consensus autour de l'évaluation, par le Centre national d’étude des systèmes scolaires (CNESCO) précise, dans son dossier de synthèse, que l'implication active de l'élève dans ses apprentissages, notamment par une évaluation formative (ce que sont les brevets) soutient l'apprentissage et devrait être utilisée prioritairement https://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2023/03/Cnesco-CC-Eval_Dossier-de-synthese.pdf
## 3. Concrètement, des outils pour la classe
### Des pratiques renouvelées
- **Les plans de travail numériques** : Certains enseignants, s'inspirant des principes de ludification de la classe, organisent le travail avec un logiciel permettant, en guise de brevets, de collecter des labels, comme dans le système d'arbres de connaissances de Michel Authier et Pierre Levy. Un élève ayant reçu un brevet devient alors un expert de la compétence, en le logiciel suggère à un élève souhaitant l'obtenir de consulter ses pairs experts.
- **Les conseils coopératifs** : Ces espaces de régulation collective favorisent un climat de classe positif et responsabilisent les élèves dans leurs apprentissages.
- **L’intégration des neurosciences** : De nombreux enseignants Freinet intègrent aujourd’hui les principes issus des sciences cognitives, comme l’apprentissage distribué ou la gestion de l’attention, dans leur pratique quotidienne.
### Une modernisation des outils
- **Le texte libre numérique** : Loin d’être obsolète, le texte libre trouve aujourd’hui une nouvelle dimension avec l’usage des blogs scolaires et des projets collaboratifs en ligne.
- **L’utilisation de plateformes collaboratives** : Des outils comme les ENT (Espaces Numériques de Travail) permettent d’enrichir la coopération entre élèves et avec d’autres classes. On peut désormais écrire un texte à plusieurs mains sur un document partagé en ligne.
## Conclusion
Loin d’être dépassée, la pédagogie Freinet est au contraire en phase avec les découvertes actuelles en sciences de l’éducation, qui ne font souvent que confirmer ce que ses praticiens ressentent empiriquement depuis des décennies. Son approche basée sur l’autonomie, la coopération et l’expression trouve des échos dans les recherches les plus récentes sur l’apprentissage. Adaptable et évolutive, elle continue d’inspirer de nombreux enseignants soucieux de proposer un cadre d’apprentissage à la fois structurant et respectueux du développement de l’enfant.
## Références et ressources
- **ICEM - Institut Coopératif de l'École Moderne** : [https://www.icem-pedagogie-freinet.org](https://www.icem-pedagogie-freinet.org)
- **Dehaene, S. (2018). "Apprendre ! Les talents du cerveau, le défi des machines". Odile Jacob.**
- **Deci, E. L., & Ryan, R. M. (2000). "The ‘what’ and ‘why’ of goal pursuits: Human needs and the self-determination of behavior". Psychological Inquiry.**
- **Slavin, R. (1996). "Research on cooperative learning and achievement: What we know, what we need to know". Contemporary Educational Psychology.**
- **Connac, S. (2021). "Apprendre avec les pédagogies coopératives". ESF Sciences humaines.**
# Listes de travaux autour de la pédagogie Freinet
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Boyer, C. (2014). Place du questionnement et image des sciences dans la recherche documentaire en pédagogie Freinet. MARSEILLE 2014 SOMMAIRE, 81.hal.science/hal-03764200
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Bruliard, L. (2002). Transformation du système scolaire et innovation de la pédagogie Freinet: l'exemple de la Commission enseignement spécialisé de l'Institut coopératif de l'école moderne (1945-1993) (Doctoral dissertation, Bordeaux 2).
Bruliard, L. (2004). La pédagogie Freinet dans l'Adaptation et l'intégration scolaires. La Nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, (28), 223-234
Burity Serpa, M. H. (2016). Les contributions de la pédagogie institutionnelle à l'éducation inclusive: le cas d'une école de Seine-Saint-Denis. Spécificités, 9(1), 154-16
Carra, C. (2004). Participation citoyenne et construction de normes: quels effets sur les violences scolaires?. Spirale-Revue de recherches en éducation, 34(1), 41-53
Caron, G. (2021). Influence des déclinaisons de la pédagogie Freinet dans un projet de classes coopératives au sein d’un collège REP+. Spécificités, (2), 25-37
Chapeau, E. (2022). L’autonomie à l’épreuve du numérique et de la pédagogie Freinet. DIDACTIQUES en pratique, 73.
Clanché P. (2009). Anthropologie de l’écriture et pédagogie Freinet. Caen : PUC
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Go H.-L. (2007). Freinet à Vence : Vers une reconstruction de la forme scolaire. Rennes : PUR
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Lescouarch L.(2010). Spécificité actuelle d’une pédagogie : la pédagogie Freinet. Spirales n°45. université Lille 3, janvier 2010, p.91-101 www.persee.fr/doc/spira_0994-3722_2010_num_45_1_1159
Morin D. Paragot J.-M. Francomme O. Karakatsani D. (2018) "La pédagogie coopérative à l’université, une utopie à mettre en chantier" Paris : L’Harmattan. L’année de la recherche en sciences de l’éducation pp. 155-170.
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Vergnioux A. (2005). Cinq études sur Célestin Freinet, Presses Universitaires de Caen
Choix de documents qui se centrent sur les pédagogies de la coopération et en étudient les conditions d'efficience auprès des élèves (la plupart du temps), proposé par Sylvain Connac
Tièche Christinat C (dir.) (2015). La pédagogie Freinet – Concepts, valeurs, pratiques de classe (p. 57-72). Chronique Sociale.
Connac, S., Lemperière, M. (2016). Quels sont les effets de la formation au tutorat ou à la coopération sur le rapport au savoir, à l’école primaire et au collège ? Dans M.A. Hugon, B. Robbes, (dir.), Le rapport aux savoirs dans les pédagogies différentes (p. 15-45). Presses universitaires de Nancy.
Connac, S. (2019). Quand des chercheurs accompagnent des enseignants « engagés » dans un projet. Dans J.F. Marcel, (dir.), Recherches et militances (p. 107-126). Presses universitaires du Mirail.
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Connac, S., Haudebourg, S. (2021). La coopération entre élèves en école maternelle : entre dévolution de l’activité scolaire et autonomie responsabilisante, dans F. Torterat, J. Myre Bisaillon (dir.) Les transitions du préscolaire au scolaire (p. 139-152). L’Harmattan.
Connac, S. (2021). Se parler pour coopérer, coopérer pour apprendre, dans C. Marsollier (dir.) Espaces de parole à l’école (p. 75-84). Berger Levrault.
Connac, S. (2021). Une nouvelle déclinaison de la coopération entre élèves ?, dans C. Blanc et F.-X. Bernard (dir.) Enfants conférenciers – Une expérience éducative, sociale et culturelle (p. 279-287). Dunod.
Connac, S. (2021). La coopération entre élèves : une alternative ordinaire, dans F. Darbellay, Z. Moody et M. Louviot (dir.) L’école autrement – Les pédagogies alternatives en débat (p. 171-188). Dunod. ISBN : 978-2-88930-397-7.
Connac, S. (2016). L’avis des acteurs des séances d’analyse de pratiques professionnelles pour les enseignants stagiaires. Phronesis, Volume 4, 4/2016, 13-26.
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Connac, S. (2018). Les Discussions à Visées Démocratiques et Philosophiques : quelles pensées réflexives développées ? Spirale, 62, 103 -112
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Connac, S., Durand, M.L. (2019). Individualiser ou personnaliser ? Regards anthropologiques et pédagogiques. Penser l’éducation, 44, 9-26.
Connac, S. (2019). Origines et valeurs des conseils coopératifs d’élèves. Education et Socialisation, 53, en ligne : https://journals.openedition.org/edso/7281
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Connac, S. et Rusu, C. (2021). Analyse de l’activité de lycéens en situations pédagogiques de travail en groupe. Activités, 18(2), en ligne : https://journals.openedition.org/activites/6705#ftn5
Connac, S. et Dabo, C. (2022). Les représentations et les motivations des étudiants tuteurs en Masso- kinésithérapie dans le dispositif de tutorat entre pairs. Recherches en éducation, 46, en ligne : https://journals.openedition.org/ree/10150
Connac, S., Hueber, C. et Lanneau, L. (2022). Aménagements flexibles et coopération entre élèves. Didactique, 3(1), 11-36, en ligne : https://doi.org/10.37571/2022.0102
Connac, S. et Robbes, B. (2022). Est-il nécessaire de douter pour apprendre ? Revue Suisse des Sciences de l’éducation, 44(3), 338-350, en ligne : https://doi.org/10.24452/sjer.44.3.4